Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA GIRONDE. 211

aussi bien, que peut-il y avoir de commun entre Cicéron et Robespierre, entre Catilina et moi? »

Son entrevue avec Louis XVI, aux Tuileries, fait, dans cette batailleuse existence, l'effet d'un arc-en-ciel entre deux orages : c’est l’idylle avant la tragédie, l’embellie passagère avant la tempête furieuse qui va emporter la monarchie, l’ordre, la liberté, ébranler profondément tous les trônes de l'Europe. Guadet conseilla au roi, à la reine, l'adhésion sincère à la constitution, là était la dernière chance de salut. Au moment où il prenait congé, Marie-Antoinette lui offrit de le conduire auprès du dauphin endormi : le Girondin le considéra longtemps, puis, déposant un baiser sur son front, il dit à sa mère : « C’est un bel enfant, Madame, il faut le bien élever. — C'est ce que nous voulons faire, » répondit la reine.

Dans la lutte des Girondins contre la Montagne, Guadet est sans cesse sur la brèche, son courage ne fléchit pas un instant ; le 18 mai 1793, il compare ses adversaires aux patriotes par eæcellence de Cromwell, auteur de la Purgation du Parlement : « Ces patriotes par excellence, instruments de Cromwell, et auxquels il fit faire folies sur folies, furent chassés à leur tour. Leurs propres crimes servaient de prétexte à l’usurpateur : il entra un jour au Parlement, et, s'adressant à ces mêmes membres qui seuls, à les entendre, étaient capables de sauver la patrie : « Toi, dit-il à l'un, tu es un voleur; toi, dit-il à l’autre, tu es un ivrogne ;