Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA GIRONDE. 213

Gironde!, traqués comme des bêtes fauves, errant de retraite en retraite, souffrant de la faim, de la soif et du froid, composant dans leurs cachettes des mémoires, des tragédies, ils mènent une vie misérable jusqu'à

l'heure du dénouement. Guadet, Salle, arrêtés dans la maison de M. Guadet père, exécutés sur la seule consjatation de leur identité, Barbaroux se blessant d’un coup de pistolet, transféré et guillotiné à Bordeaux, les cadavres de Pélion, de Buzot retrouvés, à demi

dévorés par les loups, dans un champ de blé, que les paysans, confondant les proscrits avec les émigrés, sur-

blique que l'éducation des jeunes citoyens, et rappelle l’histoire de ce joueur de flûte qu’on payait simple pour jouer et double pour se taire, car il jouait faux. — La veille de son exécution, il chantait à ses compagnons un pot-pourri comique qu'il avait composé à propos de l'arrestation de Bailleul, à Provins :

Un mal auquel je suis sujet

M'effraye sur la roule,

… Car ma peur changeait chaque objet

Et je n'y voyais goutte,

Je prenais, le long du chemin,

Un äne pour un jacobin (bès)

Il est de plus lourdes méprises.

JL plaisante jusqu’au pied de l’échafaud. En descendant de la charrette, il se tourne vers son beau-frère Boyer-Fonfrède : « Il n'y a plus qu'un seul moyen pour nous sauver, dit-il. — Lequel? Demander à la Convention le décret de l'unité et de l'indivisibilité des têtes. » Il avait vingt-huit ans à peine; Fonfrède en avait vingt-sept, et il avait été président à la Convention.

1. Si, disait-il à ses collègues, les nobles sentiments étaient bannis du reste de la France, ils se retrouveraient toujours dans le cœur des habitants de la Gironde.