Orateurs et tribuns 1789-1794

L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA MONTAGNE. 291

prunte la verve gauloise, les jurons familiers et la trivalité grossière, de Rousseau, Voltaire, Montesquieu, de Corneille, dans lequel il voyait un précurseur de la Révolution‘; nature riche, exubérante, ensoleïllée ; adoré de sa famille, de ses amis, gai et cordial dans la vie privée (vu dans sa famille, il ne mérite que des éloges, avoue Robespierre), prompt à oublier les injures : on sait que, dans les heures les plus terribles, couvrant sa pitié sous ses rugissements, il arracha aux égorgeurs Lameth, l’abbé Barthélemy, Duport, qu'il tendit, avant le 31 mai, la main aux Girondins, et qu’il pleurait de douleur de ne pouvoir les sauver, quand la hache va les frapper.

Son dossier politique est le plus complet, le plus lourd de tous. N'est-ce pas lui qui dirige les grandes journées, qui arrache à la Convention les mesures décisives : le 10 Août, « je fis l'arrêt de mort contre Mandat», la visite domiciliaire par laquelle la Commune emplit ses prisons à la fin d’août 1792, le 2 septembre « c’est moi qui l’ai fait », le tribunal révolutionnaire, le 31 mai, le 2 juin, l’ajournement de la constitution de l’an II, l’organisation de la dictature, le comité de Salut public érigé en gouvernement provi-

1. « Corneille, dit-il à la tribune de la Convention, Corneille faisait des épîtres dédicatoires à Montauron, mais Corneille avait fait le Cid, Cinna; Corneille avait parlé en Romain et celui qui avait dit : Pour étre plus qu'un roi, tu te crois quelque chose, était un vrai républicain. »