Portalis : sa vie, et ses oeuvres

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Le caractère et les antécédents de Portalis, ses convictions, ses amitiés le portèrent, dès le jour de son élection, vers ce parti conservateur et libéral, dont il ne tarda pas à devenir l’un des orateurs les plus éloquents, l’un des chefs les plus courageux et les plus influents. Nous avons vu quel précieux concours il lui avait tout d’abord prêté ; il eut bientôt occasion de lui donner de nouveaux gages dans un grave et solennel débat! L’émigration, après avoir précipité la marche de la Révolution qu’elle se flattait de comprimer, en était devenue l'insaisissable adversaire et, pour ainsi dire, l’aiguillon le plus irritant. C'était elle qui alimentait les bandes de la Vendée et entretenait l’hostilité du parti royaliste; c’était elle qui, en exagérant la misère intérieure de la France, ranimait le courage des puissances coalisées et les poussait dans la voie de la guerre à outrance. Les ennemis irréconciliables de la Révolution étaient à Coblentz : la Convention, qui le sentait, avait frappé sur eux à coups redoublés et enveloppé tous les émigrés dans une même proscription. Aveuglée par la haine, elle n’avait pas compris que, si les premiers émigrés, sortis de France avec le comte d'Artois, avaient commis le crime de préférer au salut de leur pays le maintien des priviléges de leur caste et la satisfaction de leurs ressentiments personnels, il n’en était

1. Nous ne ferons que rappeler son remarquable rapport sur le rôle des juges de paix en matière de conciliation (séance du & nivôse an IV) et les objections suceinctes qu’il éleva, au point de vue de la marche des services administratifs, contre la création d’un ministère de la police (séance du 12 nivôse, an IV.)