Poussière du passé : (notes et tableaux d'histoire)

LE ROMAN D'UNE IMPÉRATRICE 91

il, iln’y a eu, en aucune façon chez elle affectation de cynisme, ni même oblitération du sens moral, ni même dépravation de l'esprit. Le favoritisme mis à part avec toutes ses conséquences, elle est sévère en fait de morale et très susceptible en fait de pudeur, de telle sorte qu'on pourrait peut-être dire d’elle qu’il lui sera beaucoup pardonné parce qu’elle a beaucoup aimé.

De ces favoris, celui qu’elle affectionna le plus entièrement fut Grégoire Orlof. Il avait été son complice dans la conspiration victorieuse contre Pierre IIT. Elle fut, paraît-il, tentée de l’épouser, et le mariage fut si près d’être conclu qu’on alla demander au vieux feld-maréchal Razoumofski en quelles formes lui-même, en d’autres temps, était devenu secrètement l’époux de l’impératrice Élisabeth. Il était chantre dans la chapelle impériale quand celle-ci l’avait distingué. Elle l'avait tiré de cet humble emploi, et après lavoir élevé, sans qu'il eût jamais servi, à la plus haute dignité militaire, elle s’était unie à lui. C’est de ce précédent que Catherine et Grégoire Orlof furent au moment de s’autoriser. Néanmoins, le projet ne se réalisa pas.

On raconte que lorsque l’envoyé de Catherine