Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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régnait dans la ville où ils venaient faire une révolution. Ceus qui n’avaient pas su exercer leur vengeance , implorèrent celle ‘des lois ; l'assemblée les repoussa avec mépris. On sortit de Paris avec la même précipitation que l’on sort d’une ville qui va être assiégée : Rouen devint particulièrement le refuge de toutes les familles fugitives.

Nous avons déjà vu que le roi, depuis la journée du »ojuin, avait fait fermer le jardin des Tuileries. Par cette précaution, il se mettait moins à couvert des attaques que des invectives de ses ennemis. L'assemblée législative lui ôta cette faible barrière,en ordonnantque la terrasse des feuillans, qui conduisait au lieu de ses séances , serait rendue publique. Les jacobins et tout le peuple qui marchait à leur suite, s’emparèrent sur-lechamp de ce lieu ; mais ils affectèrent de s’interdire à eux-mémes l'entrée du reste du-jardin. Ils étendirent, le long de la terrasse, un ruban tricalore, pour en indiquer la séparation; plusieurs écriteaux en indiquaient les motifs injurieux. L’insurrection s’annonçaitsi hautement dans ce jardin , que la cour pouvait apprendre de ses ennemis, quel jour, pär quelle force et par quels moyens elle serait attaquée.

Les hommes odieux au parti populaire étaient poursuivis par-tout où ils pouvaient se montrer: d'Eprémesnil fat assailli par un groupe furieux, aux environs du Palais-Royal; on le déshabilla, on lui porta plusieurs coups de sabre; on le traîpait tout sanglant, on ne semblait différer sa mort que pour lui faire dévorer plus long-temps les outrages. Pétion arriva dans ce moment : respecté de la foule, il sauva la vie à d'Eprémesnil, Celui-ci lui adressa ces paroles prophétiques : Comme vous l'êtes aujourd’hui, monsieur, j'ai été porté en triomphe, et vous me voyez maintenant en proie aux fureurs du peuple. Ne vous fiez point à sa faveur, ni à votre fortune actuelle.

Dans le même temps, on apprit que les massacres ecommençaient dans le Midi. La ville d'Arles, depuis long-temps livrée aux divisions de deux factions acharnées, fut ensanglantée par la vengeance du parti populaire, qui avait été quelque temps comprimé, À Toulon, neuf personnes accusées d’aristocratie, furent égorgées. L'histoire cesse, à l’époque où nous entrons, de recueillir les noms des victimes, tant elles s’offrent en foule. D'un autre côté, il s'était formé, dans l'Ardèche, un rassemblement contre-révolutionnaire, qui pouvait aisément se grossir dans un pays trop disposé par sa situation, et sur-tout par le caractère ardent de ses habitans , au fléau des guerres civiles. Les rebelles avaient à leur tête un ancien gentilhomme nommé Dusaillant, Il avait plus d’impétuosité que d'adresse; il commença Son entreprise sans l'avoir méditée. Il manqua d’habileté pour appeler autour de lui les nombreux mécontens qui