Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

LÉGISLATIVE. 297

avaient été conduits dans ces prisons. La haute-cour quidevait les juger, s'était bientôt convaineue du peu de gravité ou du peu de preuves des délits qui leur étaient imputés. Elle n'avait Pu encore en condamner aucun; par timidité, elle différait à les absoudre. Ils étaient au nombre de cinquante-trois. Tous les raffinemens de la barbarie avaient été épuisés dans leur translation. Ils avaient commencé à se mettre en marche le rer septembre. Le ministre Roland employa tous les moyens pour les éloigner ou pour leur donner une autre destination. Le# plus furieux de ses collégues, Danton, tonna contre lui, ordonna que lenr marche serait continuée. Ils avançaient lentement; on les avait entourés de gardes qui provoquaient contre eux les outrages du peuple. Mais par-tout,sur leur pas sage, ce peuple à qui on commandait le meurtre, ne ressentait que de la pitié. Le 9, ils arrivaient à Versailles; on le savait à Paris. La commune n’a besoin que d'appeler les chefs de ses sicaires; ils partent, ils traversent Paris. Ils annoncent leur nouveau crime : on frémit, nul nese présente pour les arrêter. Ils arrivent à Versailles, au moment où les prisonniers allaient passer la grille de l'Orangerie. Ils voient le peuple attendri et pleurant autour d'eux, et reconnaissant quelques hommes dont il avait éprouvé la bienfaisance. Fournier l'américain s’écrie que deux mille hommes sont cachés dans le château et dans toutes les avenues; qu’ils se tiennent prêts à délivrer les prisonniers. Il donne le signal, le massacre commence... Les bourreaux ne conservèrent plus cette apparence de tribunal qui, au 2 septembre, avait contribué du moins au salut de plusieurs. Trois des prisonniers échappèrent seulement, ils avaient été laissés pour morts au milieu de leurs compagnons. Pendant la nuit, des femmes passèrent à côté de ce lieu inondé de sang; elles entendirent des sons plaintifs ; elles eurent le courage de s'approcher, de relever ceux qui respiraient encore, de les garder chez elles. Le fidèle et valeureux Brissac cherchait à se défendre contre les assassins : il mourut sans en avoir pu sacrifier un seul. Delessart fut atteint du coup mortel auprès de lui, Delessart qui avait été envoyé à Orléans pour manifester, disait Guadet, son innocence. Sans doute, c’est une atroce calomnie que d’imputer aux girondins la moindre part à tous ces meurtres, qui les remplirent d'horreur; mais quel profond repentir Brissot, Guadet et Vergniaud même, ne durent-ils pas avoir de la cruelle activité avec laquelle ils avaient peuplé les prisons d'Orléans ?

Cependant, un autre ordre de mort est parti de la commune de Paris, etdesbureaux du ministre de la justice. menace, il va éteindre l’homme qui a le plus consacré sa vie au bien de l'humanité; d'est le vertueux Larochefoucault : il avait eu la

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