Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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Le premier résidait alors à Blankenbourg, dans les états du roi de Prusse, et y recevait les secours de la Russie; le second résidait à Londres, et le gouvernement anglais lui laissait la direction des troubles qu’il voulait susciter en France : cha cun d’eux avait de nombreux commissaires qui pénétraient dans les diverses parties dé la France. et qui arrivaient avec des instructions souvent opposées, Dans le Midi et dans Ouest, ils ne faisaient entendre que des provocations violentes. Tous les chefs de chouans se tenaient prêts à recommencer les hostilités, et il y avait eu déjà assez d’excès commis Pour annoncer une guerre civile renaissante. À Paris, les commissaires du prétendant parlaient un langage si conciliant et si pacifique, que, considérés comme mandataires d’un prince expulsé, on pouvait les accuser d’hypocrisie; et considérés comme conspirateurs, on pouvait à plus juste titre les accuser d’ineptie. On en vit un exemple dans une affaire qui eut une grande influence sur le 18 fructidor. Au mois de pluviôse de l’an 5 ( février 1797), on arrêta quatre commissaires de Louis XVIII. Le baron de Poli, Duverne du Presle , l'abbé Brottier, neveu d’un savant recommandable , avaient l’indiscrétion, l’activité sans objet, la jactance, et beaucoup d’autres vices qui discréditent des conspirateurs. Lavilleurnois était d’un autre caractère; c'était un ancien magistrat de mœurs douces et recommandables, qui n’avait l’air de conspirer que pour mettre sa conscience de royaliste en repos. Ils s'étaient communiqué les instructions que le prétendant leur avait données de Blankenbourg : ils savaient très-bien ce qu’on devait faire quand Louis XVIII serait proclamé, les ministres qu’il faudrait lui donner, l'étendue de l’amnistie qu’il pourrait accorder; mais le moyen d'opérer cette grande révolution les embarrassait encore. Le hasard, ou plutôt leur mauvais génie leur fit rencontrer deux hommes qui leur parurent une acquisition précieuse; l’un était le chef-d’escadron Malo, quis’étaitmontré terrible aux anarchistes lorsdeleur extravagante invasion du camp de Grenelle, l’autre était Ramel, commandant de la garde du corps-législatif. Le premier de ces deux militaires accueillit avec une complaisance perfide les propositions des commissaires royaux, en instruisit le gouvernement. Le même piége qui avait été tendu aux anarchistes pour les aider à conspirer, à éclater et à se perdre, favorisa la folle confiance des commissaires royaux. Le directoire, d'un côté, le prétendant, de Vautre, étaient instruits jour Par jour des progrès de cette conspiration ; l’un fournissait la trame que l’autre développait. On avait fait de magnifiques Promesses aux commissaires : Ramel s'était engagé pour les g'enadiers de la garde, Malo pour un régiment de dragons,