Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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plus opposé à celui dont elle avait été transportée dans la grande année de 1789. Il y eut beaucoup d’assemblées primaires et beaucoup de corps électoraux où l’on entendit des provocations directes au rétablissement de la royauté. Les républicains ardens n’y étaient pas seuls outragés; on y témoignait la même aversion pour ceux qui se piquaient de scrupules constitutionnels : « Choisissons, disaient un grand nombre d'électeurs, choisissons des hommes qui v’aient donné aucun gage à la révolution, qui, en accomplissant nos vœux, sachent encore ménager notre tranquillité; choisissons des royalistes purs et paisibles, qui , sans trop effrayer les républicains , sans qu’il nous en coûte aucun effort, sans qu'on nous ait invités à prendre les armes, rendent un jour ce simple décret : Louis XVIII est proclamé roi de France.

Insensés, qui ne se défiaient point du sommeil du directoire !

Le résultat de ces élections ne fut pourtant pas tout-àfait tel que l’avaient espéré ceux dont je viens de répéter les discours : il y avait eu des compositions entre les partis; les hommes sages avaient dirigé plusieurs choix. Le nouveau tiers eut une existence si orageuse et si courte, qu’il est difficile de caractériser l’esprit qui l’animait. Ce qu’on y remarquait le plus, c’étaient l’inexpérience et la présomption.

Voilà Je corps-législatif renouvelé : la guerre s'allume ; les nouveaux députés s’efforcent, par la véhémence de leurs discours, de faire honte à ceux qui les ont précédés de leur froide opposition contre le directoire : « Est-il temps de garder encore de tels ménagemens ? Faut-il ‘trembler . devant les faibles débris de la convention ? Abolissons toutes ses lois; ne souffrons plus un mélange illégitime de l'esprit constitutionnel et de l'esprit révolutionnaire. » C’étaient là leurs discours ordinaires, et ce n'étaient pas encore les plus indiscrets qu’ils tinssent en présence de républicains ombrageux. Le directoire paraissait prendre plaisir à provoquer chaque jour de nouvelles offenses, pour avoir droit de les punir. Rien n’était plus Sinistre, rien ne fut plus fatal que son silence. Il venait de recevoir une confession lâche et suspecte de lun des complices de Lavilleurnois. Duverne du Presle, fatigué de quelques mois de captivité, avait livré tous les secrets de son parti, et avait fourni une foule de détails sur l’organisation des commissaires royaux, sur les instructions données par le prétendant même relativement aux élections de germinal. C'étaient des trésors pour la vengeance que méditait le directoire : il les recueillit, et se tut. L'émigré d’Antraigues , le plus violent peut-être