Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

EXECUTIF. 147

de Lafayette, et son refus est tel, qu’il trahit sa dignité, et fait connaître indiscrètement l'espèce de joug qu’un roi puissant porte quand il se ligue avec l'Angleterre : J'ai les mains liées , répond-il avec douleur à Mme de Lafayette. Une faveur bien douloureuse restait à demander , et elle est accordée. La prison d'Olmutz s'ouvre à madame de Lafayette et à ses filles. Leurs soins prolongent la vie d’un mari et d’un père, mais elles exposent la leur, La maladie les consume ,.et Lafayette ne peut obtenir d’elles-mêmes qu’elles aillent respirer un air moins contagieux. Bonaparte , sans consulter un gôuvernement que les préjugés révolutionnaires rendraient inflexible , qui peut user de ses victoires, en réclame un noble prix; Lafayette, Latour-Maubourget Bureau-de-Puzy sortent des prisons d'Autriche ; un de leurs amis fidèles, Romœuf, avait été envoyé à Vienne , par le général, pour exiger leur liberté ; mais le directoire leur refusa encore de rentrer dans leur patrie.

Le traité de Campo-Formio ne fut ni troublé ni accéléré par le 18 fructidor. Si le directoire eût remis cette négociation à tout autre que Bonaparte, il est vraisemblable qu’elle eût été rompue. Carnot prétend dans son mémoire que Letourneur de la Manche et lui étaient les seuls directeurs qui fussent fidèles à appuyer les dispositions pacifiques du général. {Les révélations de Carnot sur les intrigues de ses collégues seraient précieuses pour l’histoire, si l'esprit de vengeance ne les rendait suspectes). Dans le même temps , la paix avec l'Angleterre se négociait à Lille. Les plénipotentiaires francais étaient, Pléville le Peley, Letourneur de la Manche et Maret ; le lord Malmesbury représentait l'Angleterre. Cette île jalouse paraissait voiravec crainte sa situation lorsqu'elle serait isolée de toutes les puissances du continent. Ce fut üne opinion généralement répandue , que les plus grandes difficultés de cette paix étaient aplanies, qu’elle était près de se conclure. Le directoire montra la plus injuste défiance contre les négociateurs qui étaient parvenus à cet heureux résultat. Il les rappela et les remplaca par Treilhard et Bonnier , qui eurent à peine le temps de communiquer les instructions nouvelles qui leur étaient remises. Le lord Malmesbury recut de son gouvernement l'ordre de quitter Lille. La paix fut éloignée. On en murmura; on ne savait pas encore combien il faut se défier d'une paix avec l'Angleterre.

Un traité qui déjà avait été conclu avec la reine de Portugal fut annulé par la volonté du directoire. Le ministre portugais qui l’avait négocié, M. d’Aranjo-d’Azeredo , reeut l’ordre de quitter le territoire français , fit des repré-