Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

EXECUTIF.

Le sénat de Berne attira cet orage, ou du moins manqua de prudence et de fermeté pour le détourner. Il n'était aucun gouvernement en Europe qui présentât un peuple

lus heureux, des campagnes plus florissantes , que le sénat de Berne. Un peu d’orgueil corrompait les fruits de cette vigilance paternelle. Les villes du pays de Vaud, soumis à sa domination, touJours croissantes en prospérité , aVaient acquis des lumières, et cet esprit d’ambition qui les sui ordinairement. Le conseil de Berne commencait à craindre ces citadins inquiets. Il n’accordait rien à leurs vœux; il pe se ralentissait pas dans ses soins pour leur bonheur, mais, comme ils étaient humiliés ,-ils étaient ingrats. La révolution de France leur donna l'espoir d'entrer en quelque partage de l'autorité souveraine; ils ne pouvaient plus supporter le nom de sujets. Les magnifiques seigneurs furent inflexibles. Ils résolurent de fermer des assemblées de club où ces prétentions étaient débattues avec emportement. Bientôt les Vaudois en élèvent une beaucoup plus forte : ils demandent à former un eanton séparé ; ils menacent de recourir à l'intervention du gouvernement francais. La catastrophe de Venise venait d’éclater ; elle devait avertir les seigneurs bernois du danger que couraient alors les gouvernemens aristocratiques ; en ne cédant point à des modifications que le temps amène , et que la nécessité commande. Ils agirent contre les Vaudois comme contre des séditieux déclarés. lls rassemblent leurs milices ; ils font transférer au château de Chillon quelques-uns des chefs du mouvement qui s'annonce. Il éclate : le pays de Vaud se déclare libre. Il appelle la république française à son secours , comme subrogée, disait-il, aux droits du duc de Savoie ; il se confie à la générosité ; il ne songe point à la force, ni à l'ambition de l’auxiliaire qu'il s’est donné.

Le directoire attendait ce signal. Une telle expédition semblait ne demander que peu d'efforts à ses armées victorieuses. Mais quel intérêt la lui commandait ? La neutralité de la Suisse défendait une vaste portion du territoire français qui n’est point couvert de forteresses. Le directoire n'avait aucun grief politique contre les Treize-Cantons. Il est vrai qu'un ministre anglais, M. Wickam, avait, du sein de la Suisse, ourdi beaucoup d'intrigues avec des aventuriers français, qui lui vendirent pour de l'or la promesse insensée d’opérer une contre-révolution. Mais déjà on avait satisfait au directoire à cet égard, et M. Wickam s'était éloigné. Quel était done l'intérêt du directoire ? Il en est un qui offense tant la gloire nationale, que je rougis de l'indiquer, et que je ne puis le regarder comme le mo-