Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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tous leurs engagemens envers les Vaudois, dont ils s'étaient déclarés les protecteurs. Mais le directoire ne sut point s’arrêter après ce succès, qui se colorait encore du prétexte de l'affranchissement d’un peuple nombreux. Il concut le funeste système de faire plier toute la Suisse sous le niveau de la révolution française, et de la constitution même, qu’on invoquait, et qu’on ne suivait plus en France. À l'imitation de ce code, on en imagina un qui devait être substitué au pacte fédératif aaquel les Treize-Cantons avaient dû tant de bonheur et de gloire. C'était alors le talent le plus commun que celui de faire des constitutions : on en offrait, ou plutôt on en imposait à tous les peuples voisins. Le directoire trouvait un grand plaisir à voir son image réfléchie dans une suite de directoires batave, cisalpin, ligurien ; il fallut y ajouter un directoire helvétique. Ce système avait pour la Suisse un inconvénient que la première réflexion démontrait. Par une sorte de phénomène politique, la démocratie pure s'était con.servée dans sept cantons de la Suisse. Les appeler à la liberté que donnent les salutaires fictions du système représentatif ; c'était substituer pour eux l’ombre à la réalité ; c'était profaner dans son berceau la liberté, dont le directoire voulait établir le culte dans toute l'Europe; c'était changer la cause des Français. Les cantons de Schwitz, d'Uri, d'Appenzell, de Glaris, de Zug et d'Underwald, refusèrent d'approuver la constitution nouvelle que, par une raison contraire, les cantons, auparavant aristocratiques , avaient acceptée. Nulle exhortation ne pouvait les convainere que c’était pour les in“ térêts de la liberté même qu’on limitait celle qu’ils avaient recue de leurs aïeux. Ces hommes simples et fiers adressèrent au directoire de France des observations bien propres à vaincre son opiniâtre et cruel propagandisme. Quoique pressé par tous les grands événemens qu’il me reste à décrire, je m’arrête pour donner des fragmens d’un mémoire où tout respire la sagesse , la franchise et l'élévation. que doivent inspirer une vieille liberté et des mœurs pures,

« Nous jouissions à peine des bienfaits de cette sécurité ; lorsque tout-à-coup nous recûmes , par le gouvernement provisoire de Soleure , le projet d’une nouvelle constitution helvétique , et l'invitation pressante d’y adhérer ; nous apprimes en même temps, mais d’une manière indirecte , que tous les cantons de la Suisse seraient forcés de s’y soumettre.

» Nous ne trouvons point d’expressions assez fortes pour vous peindre, citoyens directeurs , la consternation que répandit parmi nous une nouvelle que le concours de tant de circonstances rendait si peu vraisemblable.

» C’est en vain que nous en chercherions pour vous ren-

d. JT