Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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dre la douleur dont elle remplit nos ames. Rien n’égale à nos yeux le malheur de perdre la constitution fondée par nos ancêtres , adaptée à nos mœurs et à nos besoins, et cimentée par la jouissance, pendant plusieurssiècles, de toute la somme d’aisance et de félicité dont nos paisibles vallons soient désormais susceptibles.

» Citoyens directeurs , s’il est possible que vous ayez formé le projet de vouloir apporter quelque changement à la forme de nos gouvernemens populaires, permettez que nous vous parlions à cet égard le langage de la franchise et de la liberté. |

» Permettez avant iout que nous vous demandions sans détour si vous avez trouvé dans nos constitutions quelque chose qui soit en opposition avec les principes de la vôtre.

» Oùtrouverez-vous ailleurs que cheznousun mode de gouvernement qui mette plus exclusivement entre les mains du peuple l'exercice et le droit de la souveraineté ; où l'égalité civile et politique soit ptus parfaite ; où chaque citoyen jouisse d’une plus grande somme de liberté? Nous neportons d’autres chaînes que les chaînes légères de la religion et de la morale, d’autre joug que celui des lois que nous nous sommes données. Ailleurs peut-être le peuple peut désirer bien des choses à ces différens égards: mais chez nous, descendans de GuillaumeTell, qui avons maintenu sans la moindre altération la constiintion qu'il nous a laissée, et pour la conservation de laquelle nous vous parlons avec toute l'énergie que nous inspire le sentiment de plaider la plus juste des causes; cheznous il n'existe qu’un seul vœu, un vœu unanime, celui de rester soumis au gouvernement que la Providence et le courage de nos aïeux nous ont légué. Et quel gouvernement, citoyens directeurs, pourrait être plus en rapport avec le vôtre.

» Nous, les peuples de ces contrées , dont vous avez si souvent promis de respecter la souveraineté, c’est nous qui sommes les souverains de ces petits cantons ; nous élisons nos magistrats et les révoquons à notre bon plaisir; les di. visions de nos cantons élisent nos conseils, qui sont nos représentans, les représentans du peuple,

» Telles sont, en abrégé, les bases de nos constitutions. Ne reposent-elles pas sur des principes semblables à ceux sur lesquels votre gouvernement est assis ?

» Eh ! comment auriez-vous donc la volonté d’anéantir notre bonheur en touchant à notre organisation politique ? Quels seraient vos motifs pour le faire , et quelle espèce d'avantage pourriez-vous en retirer ?

» Supposez même que vous en eussiez le pouvoir, nous eroyons que votre justice ne vous permettra pas d’en faire