Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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coups de ces brigands. Mais jamais un plus magnifique spectacle ne s'était offert pour distraire des fatigues et des périls ; on découvre la cime des pyramides. Les plus grands monumens par lesquels les hommes aient défié le temps , voilà la conquête réservée pour ce jour. Ici le Nil se déploie tout autour de la contrée florissante qui est née de son limon, et qu’il fertilise. Dans un plus grand éloignement, on aperçoit les mosquées et les minarets du Caire. On va bientôt occuper les champs de l'antique Memphis. Ce qui ajoute encore au grand effet de ce tableau , c’est l’armée des Mameloucks rangée en bataille ; leurs armes réfléchissent les feux du soleil ; ils sont chargés du fer qui leur a soumis cette contrée, et de l’or que leurs exactions en ont arraché. Leurs beaux chevaux arabes partagent leur luxe guerrier et toute leur ardeur du combat ; les hennissemens se mêlent au son des trompettes. L’amour de la gloire n’a jamais transporté plus vivement les Français ; ils brûlent d’en venir aux mains; ils font craindre à leur général l’impétuosité de leurs mouvemens. Il soumet enfin leur courage; il leur prescrit les plus grands efforts de la discipline. Les divisions reprennent cet ordre de bataille qui leur a valu la victoire de Chebreisse. Toute la ligne est formée par échelons et par divisions qui se flanquent. Elle s’ébranle. Les Mameloucks préviennent ce mouvement ; ils fondent sur les deux divisions Desaix et Régnier, qui se tiennent immobiles dans leurs carrés profonds. Elles ne font usage de leur feu qu’à demi-portée de la mitraille et de la mousqueterie. Les Mameloucks s’acharnent en vain à rompre ces murailles de feux, ces remparts de baïonnettes. Leurs rangs sont éclairis ; ils se retirent en désordre.

Pendant ce temps, les deux divisions Bon et Menou marchent à pas de charge sur le village d'Embabé, que les Mameloucks défendaient avec quarante mauvaises pièces d’artillerie. Les généraux Rampon et Marmont , à la tête de deux bataillons , tournent le village, et se mettent à couvert de la cavalerie des ennemis ; et quand le village est emporté, ils ferment la retraite à quinze cents Mameloucks , qui sont tous passés au fil de l'épée ou noyés dans le Nil. Quarante pièces de canon, quatre cents chameaux, les bagages et les vivres de l’ennemi , sont le prix de cette victoire , qui n’a coûté que quarante hommes tués ou blessés.

Le lendemain de la bataille des pyramides, 4 thermidor , les grands du Caire vinrent offrir de remettre la ville au pouvoir des Français. Bonaparte y entra les, y calma quelques désodres qu'y avait excités la fuite de Mourad-Bey , dont la maison avait été pillée et brülée. Ce chef des Mameloucks qui partageait avec Ibrahim-Bey l'autorité souveraine, se retira dans la Haute- Egypte. Le général Desaix reçut ordre de l'y