Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

224. DIRECTOIRE

ranimée pour prononcer ces mots: Marchez toujours. Déjà le héros n’est plus. Les soldats consternés apercoivent Moreau, et Moreau sera encore une fois leur général. L'action est si vivement engagée, que les combinaisons militaires sem blent suspendues des deux côtés. La plus grande chaleur du combat est auprès du poste de Novi , que les Français défendent avec toute leur bravoure, qu’ils abandonnent, qu'ils reprennent , et d’où le général en chef se retire enfin après avoir essuyé et fait souffrir aux ennemis une perte énorme, après avoir eu un cheval tué sous lui et ses habits criblés de balles. Mais en se retirant il a été forcé de se séparer des corps que commandent les généraux Pérignon , Grouchy et Colli. Suwarow se jette avec impétuosité sur Novi, où ces corps se sont réfugiés. Il en fait enfoncer les portes à coups de canon. Il fait une multitude de prisonniers, parmi lesquels sont les trois généraux que je viens de nommer, et qui n’ont cessé de se battre que lorsque leur sang est presque épuisé par leurs blessures. Gette bataille , une des plus meurtrières qui se soient données depuis l'invention de la poudre, et où la perte des Français fut évaluée à près de vingt-cinq mille hommes par les alliés , qui avouèrent de leur côté plus de quinze mille hommes tués ou blessés, ne valut à ces derniers que la conquête des forteresses du Piémont , qui leur résistaient encore. Il leur fallut, pour se rendre maîtres de Coni, remporter sur le général Championnet une nouvelle victoire , qui fut vivement disputée. Presque tout le territoire de Gênes fut conservé.

J'ai dit enfin la dernière défaite des Français, La fortune change, l'esprit de discorde qui vient toujours arréter les coalitions triomphantes s’est répandu sur les alliés, Suwarow vainqueur dans tant de journées mémorables, est comblé d’honneurs ; la reconnaissance de son souverain ne lui laisse rien à envier. Mais le cabinet de Vienne , soit par quelque jalousie, soit par esprit de domination, trace, pour la fin de cette campagne, des plans qui ne s’accordent plus avec les opérations de Suwarow. Il n’est plus maître de chercher lui-même le fruit qu’il peut tirer de ses victoires. On dispose de son armée, il faut qu’il abandonne l'Italie aux deux généraux autrichiens Kray et Mélas ,

ui l'ont aidé à la conquérir, et qu’il se rende en Suisse, où déjà un corps d'armée russe est venu fortifier l’archiduc Charles. Mais ce prince victorieux va-t-il servir sous les ordres du héros russe qui vient d’éclipser sa gloire ? Soit que la jalousie fût entre les deux généraux, soit qu’elle ne fût qu’entre les deux cabinets, on vit avec étonnement l’archiduc Charles quitter Zurich avec Pélite de son armée pour