Rapport sur les Dommages de Guerre causés à la Serbie et au Monténégro présenté à la Commission des Réparations des Dommages

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débats ne peut nous fournir les éléments de décision dont nous avons besoin. Nous sommes donc obligés de chercher ailleurs les principes qui nous serviront de guide dans le choix que nous avons à faire.

A moins de tomber dans l'arbitraire, force nous est de nous en rapporter au droit commun qui seul peut nous offrir une solution équitable. |

Comme on sait, le droit commun est, en principe, pour la division de l'obligation entre plusieurs codébiteurs. Toutefois dans certaines situations exceptionnelles, pour des motifs d'ordre public ou autres, il s’écarte de cette règle et admet la responsabilité solidaire de deux ou plusieurs débiteurs tenus d’une même obligation.

Il me semble que les raisons de droit et de fait qui justifient cette dérogation au droit commun se retrouvent dans le cas qui nous occupe avec toute leur force.

Au cours de nos débats il a été généralement admis que la cause initiale et génératrice de l’obligation de nos ennemis de nous indemniser des pertes subies réside précisément dans un délit, dans le fait même de nous avoir fait une guerre agressive et injuste. La Délégation britannique le déclare formellement dans son mémoire en affirmant que «la guerre elle-même était un acte d'agression et un délit. »

J'ajoute qu'une des commissions de la Conférence s occupe plus spécialement de déterminer la responsabilité finale des auteurs de la guerre et d’en établir les sanctions.

D'autre part, il est hors conteste que l'agression dont nous avons été victimes a été dès le début, concertée entre les Etats qui sont entrés l’un après l’autre en lice.

Or, dans le droit pénal commun, quand un crime ou un délit est commis par plusieurs personnes, la solidarité a lieu de plein droit pour toutes les réparations, pour tous les dommages-intérêts résultant de ce crime ou de délit.

Je ne vois pas de raison qui s’opposerait à ce que nous adoptions cette règle et que nous l’appliquions aux auteurs responsables des dommages de guerre.

Mais, comme on pourrait à la rigueur contester l'application à nos ennemis de cette règle empruntée à la législation criminelle, je dois ajouter, qu'en dehors même de toute infraction, il y a d’autres motifs non moins forts, qui militent en faveur de l'établissement de la responsabilié solidaire de nos ennemis.