Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France

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Souvent son regard triste et hon, en se dirigeant sur ses petits-enfants , laissait apercevoir des larmes. « Qu'ils sont gentils! nous disait-il, et quand je ne serai plus là, que deviendront-ils? » Puis, en nous montrant sa pelite-fille cadette : « Elle est bien jeune, si Dieu ne la protège pas; mais sa mère veillera sur elle, ainsi que ses amis. » Nous cherchions à le consoler, en lui disant que son indisposition était peu grave, qu'il avait résisté à tant de misères, el que, quelques mois auparavant, il avait fait à la chasse des courses de 9 à 10 lieues sans se fatiguer.

« Cest bien, c’est bien, répondait-il; mais j’ai 15 ans et le cœur souffre! J’espérais avoir une vieillesse plus tranquille ; mais, plus j’avance dans la vie, plus mes inquiétudes augmentent; le frisson de la fièvre m’enlève mes forces, et, ce qui est plus triste encore, l'espérance m’abandonne | »

Alors légalité de son caractère faisait place à une angoisse indéfinissable.

Le moment vint où il devait quitter l'appartement qu'il occupait depuis tant d’années, et ce changement de domicile parut augmenter son mal ; néanmoins il conservait encore ses aimables dispositions à la bienveillance ; il aimait à connaître les nouvelles politiques qui laissaient entrevoir la guerre entre la France et l'Autriche. Alors son imagination lui retraçait encore les champs de bataille où il avait va flotter Féten-