Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

CAMPAGNE DE 1807 : EYLAU, FRIEDLAND 93

pressaient de me donner la soupe préparée pour eux. Souvent, je mangeais à la gamelle, puis remontant à cheval, je continuais ma route.

J'avais aussi quelquefois recours aux vivandières. C’est une triste conséquence de la guerre d'amener le renchérissement excessif des objets de première nécessité. Alors, tout l'argent acquis ou pillé par les soldats arrivait aux vivandières. Ces femmes, exploitant la pénurie de vivres et l’abondance d'espèces, vendaient quelquefois jusqu'à vingt francs un petit verre d’eau-de-vie. Un bien petit nombre d’entre elles a rapporté quelque fortune, car, dans les batailles, et surtout dans les retraites, c'étaient leurs équipages qui périssaient les premiers.

Indépendamment de la grande difficulté que nous éprouvions pour vivre, nous ne savions souvent comment nous faire comprendre. Par une singularité remarquable, les patois de nos soldats, basbretons ou provençaux, se rapportaient assez à l’idiome du pays pour bientôt pouvoir nouer par eux des relations. Un latin corrompu nous servait en outre d'intermédiaire avec les curés.

Je reçus alors l’avis officiel de ma nomination comme chevalier de la Légion d'honneur : elle était datée du quartier général de Finkenstein, 14 avril 1807.

Cependant, la mort décimait notre armée à tel point qu'un régiment nouvellement organisé, le 32° de ligne, composé presque en entier de Pié-