Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire
250 SOUVENIRS D'OCTAVE LEVAVASSEUR
Nous rentrâmes à Paris le soir même, après que l'heure de l'entrée du roi dans sa capitale eut été donnée pour le lendemain. Au matin, le maréchal partit de son hôtel, suivi de tous ses officiers, et nous allâmes nous réunir au cortège à Saint-Ouen. Le roi et sa suite traversèrent la plaine Saint-Denis, pour regagner la route et la barrière de La Chapelle. Sur notre passage, la foule remplissait la plaine, les rues, les places publiques; chaque fenêtre formait un tableau de têtes animées; toutes les bouches criaient : « Vive le Roi! » Jamais entrée ne fut plus triomphale.
Je n’essaierai pas de décrire les événements qui suivirent cette journée : ils sont du domaine de l’histoire générale. Chaque soir, les théâtres étaient remplis d’une foule enthousiaste. On avait soin de choisir des pièces qui renfermaient des allusions aux circonstances présentes. On jouait Lully et Quinault à l'Opéra-Comique, la Jeunesse de Henri[V aux Français, ŒEdipe à Colone à l'Opéra. Quand le roi se rendait à l'Opéra avec la duchesse d’Angoulême, au moment où OEdipe chantait ces vers
« Elle m'a prodigué sa tendresse el ses soins, »
« Son zèle dans mes maux n'a fait trouver des charmes, » « Elle les partageait, elle essuyait mes larmes; »
« Son amour attentif prévenait mes besoins, »
les applaudissements les plus frénétiques éclataient de toutes parts. L’orchestre, répétant de temps à autre l'air de Vive Henri IV, excitait un