Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

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anglais, la station a quitté l’île exprès pour faciliter son départ. » Le marquis de Grivel fit entrer ces deux hommes chez le maréchal; l'entretien dura une heure environ, puis le marquis remmena ses deux prisonniers. J’entrai de nouveau chez le maréchal, et j’aperçus alors des liasses de proclamations; c’étaient celles, saisies dans la voiture de ces deux émissaires, que l'Empereur avait lancées le long de la route et à Lyon. Quelques-unes annonçaient les rapports amicaux de Napoléon avec l'Autriche (1).

Au petit jour, le maréchal ouvrit la porte de la pièce où je me tenais, et me dit : « Levavasseur, faites demander les généraux Lecourbe, Bourmont, Jarry et Mermet. » J’exécutai l’ordre et ces généraux arrivèrent successivement dans la matinée. Ma chambre fut bientôt remplie, comme la veille, des hommes les plus dévoués au roi, qui, ayant appris indirectement les défections qui se manifestaient de toutes parts, venaient jeter une terreur que je repoussais toujours (2).

L’audience du maréchal se prolongea long-

(4) Que la connivence de l’Angleterre et de l'Autriche ait été alors un bruit colporté par les émissaires de Napoléon, la chose est possible. Mais, d'après H. Houssaye, dans 4845, aucun

écrit, ou pièce officielle, n’y aurait fait la moindre allusion. (Note de l'éditeur.)

(2) Les incidents divers de la nuit du 13 au 44 mars, les émotions qui agitèrent le maréchal Ney avant sa défection (d'après les pièces du procés), ont servi de sujet à un acte émouvant de M. Georges de Labruyère, joué à Paris (Théâtre Antoine), en 1898, et où l’un des principaux rôles est celui de l'aide de camp Vavasseur. (Note de l'éditeur.)