Souvenirs militaires d'Octave Levavasseur, officier d'artillerie, aide-de-camp du maréchal Ney (1802-1815) : un officier d'état-major sous le 1er Empire

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1813 — LES CENT JOURS. WATERLOO 275

temps, les troupes etla population détruisaient dans la ville les insignes de la royauté; on faisait tomber les enseignes à l'effigie des Bourbons. Chacun avait quitté les décorations royalistes. Je rentrai chez moi, consterné. Le maréchal avait laissé ouverte la porte de son appartement; il me dit: « Eh bien! Levavasseur?.…. » Je marchaï lentement vers lui, les larmes aux yeux. « Monsieur le maréchal, lui dis-je, vous êtes perdu! Comment ternir, en un jour, une aussi haute réputation et tant de gloire? » — « Je ne puis faire autrement, s’écria t-il; la patrie avant tout, mon ami; la France ne veut point des Bourbons : nous devons obéir au pays. Les puissances alliées sont d'accord avec Bonaparte : le baron Kolher, général autrichien, était venu le trouver à l’île d’Elbe; les Bourbons ne pouvaient plus régner. On a engagé Napoléon à débarquer en France, sous la condition de ne jamais faire la guerre hors des limites; le roi de Rome et sa mère resteront en otage à Vienne, jusqu’à ce que l’Empereur ait donné une constitution libérale. » « Monsieur le maréchal, répliquai-je, Bonaparte ne vous pardonnera jamais votre conduite à Fontainebleau ; oubliera-t-il que c’est vous qui l’avez fait abdiquer? » — « Ce n’est pas à lui que j'ai songé dans cette affaire, c’est à la France, et il le saura, je le lui dirai. S'il compte encore nous conduire au fond de la Pologne, il se trompe; je lui dirai qu'il a abdiqué et que c’est le roi de Rome que nous défendons. » — « Monsieur le maréchal,