Trois amies de Chateaubriand

PAULINE DE BEAUMONT 95

de mort ou de sourire; ce sont des mots qui ont l'air de sortir d’une tombe entr'ouverte où va s’enclore une âme divine.

Chateaubriand a éerit, dans la Vie de Rancé: «On aimerait à avoir un recueil des derniers mots prononcés par les personnes célèbres; ils feraient le voculaire de ces régions énigmatiques des sphinx par qui, en Égypte, on communique du monde au désert‘...

Eh! bien, voici, en abrégé, le recueil des derniers mots qu'a dits Pauline de Beaumont, quand elle était encore dans l’énigmatique région qui précède le grand désert de la mort.

Au Mont-Dore, elle disait : « Je tousse moins, mais il me semble que cest pour mourir sans bruit. »

Quand René la revit à Florence, «elle n avait plus que la force de sourire ». Elle dut se reposer quelques jours. Et puis ils allèrent à Rome, les chevaux au pas, afin d'éviter les cahots.

A Terni, elle voulut aller voir la cascade, Elle tâcha de se dresser, en s'appuyant sur le bras de René; puis elle retomba et elle dit, jouant avec l’analogic de l’eau et de la destinée qui coulent : « 1] faut laisser tomber les flots. »

À Rome, Chateaubriand l'installa dans une petite maison du Pincio, près de la place d’Espagne; il y avait alentour un jardin d’orangers. Quelque temps,

4. CHATEAUBRIAND, Vie de Rancé, édition originale (Paris, H.-L. Delloye), p. 19. Et voir l’Appenñdice (D).