Trois amies de Chateaubriand

TROIS AMIES DE CHATEAUBRIAND 329

Chateaubriand fit ce qu’il put — tant il y avait en lui de vitalité prodigieuse! — tout ce qu’il put pour entrer dans la société nouvelle qui se constituait sur lanéantissement de l’ancienne, pour s’accommoder aux conditions d’une vie qu’il n’avait pas prévue. Cest ainsi qu'il entra d’abord dans la diplomate de Bonaparte. Mais il ne put s’y maintenir: et il fut mis au rancart du monde nouveau.

Toute la sensibilité des écrivains et des artistes du dix-neuvième siècle a subi le contre-coup de la Révolution. La sensibilité de Chateaubriand reçut le choc la première: et elle le prolongea par son frémissement jusque bien après lui. |

Il faut tout de même qu’une telle sensibilité ait sa contrainte, Et, autrement, quels dégâts, quelle dévastation ne ferait-elle pas!

C'est ce qui est arrivé pour d’autres, durant ce pittoresque dix-neuvième siècle, où abondèrent et sévirent les bohèmes de la sensibilité turbulente, redoutables et malheureux gaillards en qui cette folle chantait on ne sait quelle chanson d’Ophélie toute mêlée des refrains de la taverne et du mauvais lieu. Ou bien, c’est ce qui est arrivé à de petites âmes charmantes et déplorables, que nous appellerons Lucile et Dolorès. La sensibilité d’un Chateaubriand, congénitale ou gagnée par la contagion sentimentale,

29.