Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits
UN GENTILHOMME D AUTREFOIS 9
par noble enthousiasme que par besoin d'activité ou amour du romanesque ; à mesure que naïîtront les difficultés qu'il n'aura pas prévues, sa ténacité lui tiendra lieu d'expérience, sa folle énergie sera toute sa politique, jusqu'au jour où, dégagé du tumulte de ses irrésolutions, étonné lui-même de la gravité des circonstances et de la grandeur de son œuvre, il tombera, odieusement trahi, vaincu, entrainant ses amis dans sa chute et léguant à son pays de grandioses catastrophes.
La Rouërie est la personnification complète des gentilshommes de l'ancien régime : il résume en lui leurs qualités et leurs défauts, la facilité des mœurs, l’insouciance, la bravoure, la hautaine et naïve imprudence, l'enthousiasme chevaleresque et l'héroïque mépris de la mort.
Ces gens étaient doués d’une étrange souplesse vitale : pour eux l'apprentissage avait été nul, et la tâche fut terrible. Au cours de la tempête révolutionnaire, ils firent preuve d’un courage, d'une fierté, d’un stoïcisme qu'on s'étonne de rencontrer chez des hommes qu'une existence frivole n'avait préparés qu'au plaisir et à la mollesse.
Sous l'influence de M"° Beaumesnil, la Rouërie devint le plus élégant des mauvais sujets, le plus turbulent des désœuvrés : il maniait, comme Léonard, le fer à papillottes et appointa une fleuriste en renom pour qu'elle lui apprit à faire des