Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

118 CHAPITRE TROISIÈME.

sur toute ses frontières. Pour y paraître, les Bourbons avaient besoin d'un secours étranger. Serait-ce l'Espagne, comme le voulait Louis XVIII? Serait-ee l'Angleterre, comme le voulait le comte d'Artois, réfugié à Londres? À côté des deux princes s’agitaient deux illustres faiseurs, ici Puisaye, là d'Antraigues, et derrière ceux-ci le cabinet britannique, qui se préparait à jeter les émigrés sur Pa côte de Quiberon, et l'Espagne, qui, en faisant la paix avec la république, avait gardé Charette comme « dessous de cartes ».

D’Antraigues, dans cette lutte d'influence, fut, comme le due de La Vauguyon auprès de Louis XVII, dévoué aux intérêts de l'Espagne. Tout au plus disait-il que l'Angleterre pourrait être utile à ceux qu'il soupçonnait d'être sous la main des Anglais; mais ses sympathies et ses moyens étaient ailleurs. Par ses soins les agents de Paris établirent des communications directes avec Charette, et ils donnèrent la facilité d'en établir de directes entre Vérone et la Vendée ; ils en établirent aussi, en dehors de lui, avec l'Espagne, sur la demande des chefs vendéens. Sous cette double influence, il contrarièrent de leur mieux l'expédition de Quiberon; puis, lorsque le désastre fut connu à Vérone et à Venise, ici et là on chercha à en faire peser sur Puisaye la principale responsabilité : « Quand un misérable intrigant entreprend de monter sur un grand théâtre, écrivit d'Avaray, il faut qu'il y joue un grand rôle; d'autant plus qu’en voulant faire le héros il doit faire oublier que, le moment d'avant, il était moucheur de chandelles. Le comte Joseph de Puisaye est un drôle à qui il faut casser le col. » Et d’Antraigues de répliquer en promettant d'écrire en conséquence aux agents de Paris : « Ah! fiez-vous à moi. Pour Puisaye, j'ai fait pour ma consolation tout ce qu’il