Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

126 CHAPITRE TROISIÈME.

pas, et de voir en faveur un homme qui, sous prétexte de reconstruire l'édifice monarchique, s’obstinait à vouloir étayer un monceau de ruines. Montlosier écrivait à la même adresse une brochure intitulée Des effets de la violence et de la modération dans les affaires de France : « On se demande quelquefois, disait-il, si de tels hommes sont atroces, ou simplement imprudents. » Lally enfin désignait d’Antraigues comme un des obstacles à tout accommodement avec les maitres de la France (1).

Le publiciste ainsi accusé rendait de son mieux cette hostilité à ses accusateurs. Ayant à féliciter un écrivain royaliste d’un de ses ouvrages : « Si le roi, lui disait-il, a gardé jusqu'ici le silence, c’est à cause de vos louanges à Mallet du Pan; cet homme n’est sans doute pas entièrement dévoué aux jacobins, mais il penche néanmoins vers les nouveautés politiques. » Montlosier s'étant plaint à Vérone d’être regardé comme un suspect, d'Antraigues lui fit par ordre une réponse hautaine, presque dure, qui, au lieu de rendre justice à ce serviteur capricieux, mais fidèle, le laissait sous le coup d’une clémence dédaigneuse (2).

Parmi ses auxiliaires immédiats, il était aussi en butte à des inimitiés sourdes, à des rancunes provoquées par ses allures blessantes et son désir de rapporter tout à lui. Froment, qui convoilait encore la direction exelusive des royalistes dans le Midi, et ne se savait pas desservi auprès de lui, ne put supporter longtemps sa tutelle et l'accusa longuement auprès de Las Casas. On à déjà vu l'attitude de Goujon et de l'abbé Dufour.

(1) C'est du moins ce qu’affirme d'Antraigues dans une lettre à Maury du 6 février 1798. (A. K., France, vol. 59%.) Je n'ai pas retrouvé, dans la Défense des émigrés français de Larry, le passage auquel d’Antraigues fait allusion.

(2) Barpoux, Le Comte de Montlosier.