Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

MONTGAILLARD (1796). 135

Il souhaitait alors, et il eût voulu provoquer un retour offensif des Autrichiens, appuyés par les cours de Naples et de Rome. Depuis l’année précédente, il avait acquis Ja confiance de la reine des Deux-Siciles, Marie-Caroline, et, non content de lui exposer ses spéculations politiques, il la poussait dans les voies de la résistance à outrance. Unie négociation secrète en vue d’un arrangement avec la république avait été entamée par le roi Ferdinand à l’insu de sa femme, et conduite par le secrétaire de la légation napolitaine à Venise. D’Anfraigues la découvrit, fit désavouer le négociateur par la reine, et maintint ainsi la cour de Naples dans les rangs de la coalition (1).

Il eût voulu profiter de cet incident pour hâter la formation d'une ligue austro-italienne où devait entrer le pape, donnant par là à la lutte la couleur d’une guerre de religion. L’enthousiasme catholique lui semblait bon à exploiter en Italie comme en Espagne, et Louis XVII, qui en France voulait alors faire des prêtres les missionnaires de la cause royale, s’attachait volontiers à une combinaison dont le résultat devait lui procurer la reconnaissance de son titre de fils aîné de l'Église par Pie VI. D’Antraigues rédigea donc un appel à la guerre sainte, qu'on répandit comme l’œuvre du cardinal Borgia (2). Mais en quelques semaines tout fut changé par

(1) Bouray pe La Mevrrus, Quelques lettres de Marie-Caroline. (Revue d'histoire diplomatique, octobre 1888.) — AT. le comte Boulay de la Meurthe à publié, à la suite de son travail, presque toutes les lettres de Marie-Caroline à d’Antraigues conservées aux Archives des affaires étrangères. Elles sont au nombre de quatorze, et vont de 1796 à 1803.

(2) D’Antraigues à La Vauguyon, 8 octobre 1796. (A. F. France, vol. 63%, fo 113.) — Cf. ce qu'écrivait Cacault à Bona-