Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
MONTGAILLARD (1796). 139
Pichegru (1). Il était accompagné d’un autre aventurier qui se disait vicaire général de Bordeaux, l'abbé du Montet, comme lui avide d'argent et prodigue de secrets politiques fort peu sérieux.
Sa première visite fut pour le ministre de France, Lallemant : visite clandestine, car il allait prendre des instructions pour celle qui devait suivre. De son propre aveu, les ministres d'Autriche, de Russie, d'Angleterre, tout comme le représentant de Louis XVIII, s'étaient inquiétés de son arrivée et le faisaient observer par la
olice. 11 n’en vint pas moins, escorté de du Montet, fatiguer d'Antraigues de ses récits; il l'exaspérait par l'étalage de ses relations et de ses projets; il lui demandait, ainsi qu'à Drake, de l'aider à tenter au profit d’une restauration monarchique l’ambition de Bonaparte, et, sous ce prétexte, il sollicitait de l’un 12,000, de l’autre 24,000 livres. « C'est trop peu pour Bonaparte, lui fut-il répondu, et c'est trop pour vous. »
Afin de capter la confiance de d’Antraigues, le 4 décembre, il s'ouvrit à lui; après l'avoir régalé de quelques anecdotes sur Robespierre et le Comité de salut publie, il Jui raconta par le menu le détail des négociations nouées entre le prince de Condé et Pichegru l’année précédente. Ce n’était pas la première ni la dernière fois qu'il se livrait ainsi, car Mallet du Pan affirme avoir reçu de lui, à plusieurs reprises, verbalement et par écrit, de semblables confidences (2). IL joignit peut-être à son
(1) Un mémoire de la main de Courvoisier, qui passa certainement sous les yeux de Louis XVIII (A. F., France, vol. 593, fo 336), parle de ses plans et de ses moyens avec toute sympathie: et confiance.
(2) Mauzer pu Pan, Mémoires et correspondance, t. WI, p. S2F — Correspondance avec la cour de Vienne, t. Il, p. 342.