Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
LA CAPTIVITÉ. 157
énéral Kilmaine, gouverneur de la Lombardie, avec charge de le restituer à son propriétaire. Kilmaine manifesta, parait-il, des scrupules en recevant un portefeuille dont les scellés avaient été rompus et le contenu épuré à huis clos, et ce fut Bonaparte lui-même qui remit l’objet, quelques jours plus tard (11 juin), entre les mains de Mme d’Aniraigues.
III
LA CAPTIVITÉ.
Bonaparte était arrivé à ses fins. Un des principaux agents de Louis XVIII lui avait livré plus ou moins volontairement les secrets importants du parti; il restait à décider de son sort. Or, ce complice inattendu du Directoire se présentait à ses anciens compatriotes avec un double caractère : en droit, attaché à une légation russe; en fait, Français émigré. D’après les pièces remises entre ses mains, Bonaparte était contraint de lui reconnaître un caractère public au service de l'étranger, et ne pouvait lui refuser la protection du droit des gens. Pour savoir s’il échappait d'autre part aux lois contre les émigrés, Bonaparte l'avait fait interroger dès le 1° juin par l'adjudant général Landrieux, chef de la police secrète de l'armée. Il résultait des réponses de l’incalpé que ces lois ne lui étaient pas applicables, car il n'avait jamais porté les armes contre la France. Bonaparte conclut en ce sens, en envoyant l’interrogatoire à Paris. D'Antraigues ne pouvait ni être traduit comme émigré devant une commission militaire, ni devant un conseil de guerre comme espion saisi en terre conquise.