Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

178 CHAPITRE QUATRIÈME.

reste, le zèle à le remplir n’est plus... Tout ce que je demande aujourd'hui, c'est que le roi ne parle de moi ni en bien ni en mal, et qu'il m'oublie. Si j'apprenais qu'en secret on me déshonore, dès que j'en aurais la certitude et la preuve, je me justifierais de la manière la plus publique... »

Ces promesses hautaines et conditionnelles ne rassuraien{ pas pleinement la cour de Blankenbourg transférée à Mittau. Qu'il ditou non la vérité, on savait sa plume redoutable ; aussi transmettait-on le mot d'ordre à Hambourg pour lui faire fermer les imprimeries de cette ville et refuser, le cas échéant, un passeport à destination de Londres. 11 semblait qu'en Angleterre il dût être affranchi de toute dépendance et de toute réserve. Il se plaisait, de son côté, à renouveler les angoisses de La F'are, en se disant provoqué par les calomnies de ses ennemis ou les indiscrétions de ses amis. Il rappelait qu'il était Russe ef sous la protection de la Russie, que les princes (le comte d'Artois et le prince de Condé) le savaient innocent et Jui avaient fait exprimer leurs sentiments (1).

[1 avait en effet gardé des amis dans le camp royaliste. Si son oncle Saint-Priest s'était prudemment abstenu d'intervenir en sa faveur, le cardinal Maury, représentant des Bourbons à Rome, lui portait tout l'intérêt d'un vieil ami. De Venise, où il venait d'arriver, il lui fit demander les circonstances et les motifs de sa disgrâce. D'Antraigues répliqua par une série de lettres fort vives contre ses ennemis personnels, d'Avaray, le bailli de Crussol, l'abbé de Jons. Sur la publication annoncée de sa défense, il ne voulut rien promettre à

(1) D'Antraiques à La Fare, 21 août 1798. (A. F., France, vol. 63%, fe 167.) — La Fare au roi, 28 août. (Jbid., vol. 612, f°18.)