Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

A VIENNE. — THUGUT, VANNELET (1798-1800). 189 Brotier, avait été déjà l'intermédiaire (1). Gamon figure dans la correspondance de Vannelet comme « le plus grand génie » de l'époque. Non seulement il loge chez Vannelet, mais avec son assentiment, au lendemain des élections de l’an VI, il parcourt la France entière, étudiant l'esprit public et les chances d’une insurrection contre le gouvernement; en attendant il organise la révolte passive et accueille secrètement les émissaires anglais venus en France par Hambourg (2).

Ces hommes ne travaillaient pas pour Louis XVII; ils paraissaient ignorer l’existence de cette Agence de Souabe dont Royer-Collard était à Paris le principal représentant. Vannelet se vante d'avoir rendu de nombreux services aux émigrés, mais il se souvient aussi d'avoir prédit à d’Antraigues, en 1790, l’ingratitude probable des princes; il accuse Louis XVIII de maladresse et de fourberie, et affirme que personne en France ne pense plus aux Bourbons. Il connaît les plans de Sieyès contre le Directoire, et appelle leur auteur un dangereux ennemi du gouvernement; pour lui, il souhaite un héros libérateur, un monarque tenant son autorité d'une constitution, et dont la volonté nationale consacrerait le génie et la gloire. « Il est impossible, écrit d'Antraigues à Thugut, d'avoir plus d'esprit et de talent que celui qui m'écrit, mais il peut avoir des préventions, des préjugés, et voir comme certitude ce qu'il désire (3). »

En attendant de meilleurs jours, Vannelet était uni à

(1) « Je fais savoir tout cela à Grenville. » (27 novembre 1798.) (2) Gamon, ce semble, a encore correspondu avec d’Antraigues à une époque postérieure. On lit dans une lettre de Mme d’Antraigues mère à son fils, du 5 février 1801 : « Le fils (Gamon), dans la douleur et les remords dont il vous rend le dépositaire. » (3) Lettre du 20 juin 1798. (A. V.)

TS