Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
214 . CHAPITRE CINQUIÈME.
demanda s’il n'allait pas occuper la place de ministre de Russie, alors vacante; mais un général tout neuf dans la carrière diplomatique, Khanikov, y fut bientôt nommé.
D’Antraigues fût resté à côté de lui sans titre officiel, sans mission avouée, si une heureuse circonstance n’eût affermi et consacré sa nouvelle situation. Panine venait de quitter le ministère des affaires étrangères, victime de l’impératrice mère, qui ne lui pardonna pas d’avoir préparé indirectement la fin tragique du règne précédent. Voyageant à l'étranger par ordre ou pour se distraire, il vint à Dresde, et il y rencontra ce correspondant de Vienne dont il avait plus d’une fois apprécié les informations pendant son passage aux affaires. Il fut séduit par sa conversation, se laissa arracher par lui des notions utiles sur la Russie et sur l'empereur, et le recommanda vivement tant au premier ministre saxon Loss qu'à son cousin Kourakine. Il était nécessaire, écrivait-il à ce dernier, de lui donner un grade convenable, au moins celui de conseiller d'État, et une commission qui satisfit les curieux et déroutàt les malveillants (l) "A ce moment même (septembre 1802), Kourakine était remplacé au ministère des affaires étrangères par Al. Woronzov; Woronzow eut pour adjoint un jeune Polonais, ami personnel de l'empereur, le prince Adam Czartoryski, et celui-ci devint peu à peu le véritable ministre dirigeant.
Gzartoryski attira bientôt à lui la correspondance de d'Antraigues; en la lisant, il se prit, comme Panine, de sympathie pour son auteur, et ne cessa plus de lui témoigner sa confiance. Ce Francais, qui avant tout haïs-
(1) Panine à Kourakine, 8/20 septembre 1802.