Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
A DRESDE.—CZARTORYSKI, COBENZL (1802-1804). 217
Jant des demandes d'ordre secondaire présentées par lui au nom de quelque petit souverain comme l'électeur de Salzbourg, ou de quelque ami en disgräce comme Mouraviev, ministre de Russie à Madrid, et il en vint à se figurer à certains moments que la confiance dont il jouissait était telle qu’il devait craindre une trop grande responsabilité. Comme il n’entrait ni dans son caractère, ni dans ses habitudes, d’être la créature d’un seul homme, l’interrète d’une seule politique, il avait repris, à son arrivée à Dresde, sa correspondance avec la reine des DeuxSiciles; mais il fit servir sans scrupule celle-ci à sa correspondance avec Pétersbourg. Cette indiscrétion, punie, comme on l'a vu, par Paul [*, finit par être aussi connue à Naples et valut à son auteur une lecon bien méritée. D'Antraigues s'était avisé de rappeler au toutpuissant ministre Acton qu'on lui avait promis en 1794 une pension, restée impayée; il insinuait en outre qu'il possédait certaines pièces ficheuses pour la réputation du favori et de sa souveraine, et qu’il en userait. Acton riposta en lui dénonçant ses trahisons épistolaires, et Ja reine, entrant à son tour dans le débat, lui adressa sur sa tentative de chantage une verte mercuriale : « Cela n’est nullement honnête ni généreux. Si vous publiez cette pièce, j'espère que vous m'en enverrez quelque édition. » Puis, après une page de ce ton, elle lui faisait espérer le payement de sa pension avec arrérages, et l'assurait de ses « éternels sentiments (1) ». Sous le coup de cette algarade, d'Antraigques laissa tomber une correspondance que la reine tenait cependant à poursuivre (1). De toute façon, il trouvait mieux son
(1) Lettre du 26 décembre 1802. (Revue d'histoire diplomatique, année 1888, p. 555-556.) — « Depuis 1802, jusqu'à ce
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