Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

220 CHAPITRE CINQUIÈME.

Hanovre; et s’il dénonçait au premier Stackelberg, ministre russe à la Haye, comme hostile à l'Autriche, il n’en croyait pas moins bien faire pour les intérêts du second. Il poussait Cobenzl en avant, en lui rapportant les bruits qui accusaient ce ministre de faiblesse devant la France; néarmoins, il s'efforçait de faire triompher le système défensif d'Alexandre, de facon que la guerre fût - successivement provoquée par Napoléon et conduite contre lui avec toute chance de succès. Il combattait le système offensif, c'est-à-dire la guerre immédiate sur le continent, seulement profitable aux Anglais menacés d'une descente.

Ses rancunes personnelles étaient ici d'accord avec la cause qu'il défendait. Razoumovsky poussait le cabinet de Vienne à l'action, d'accord à Londres avec l'ambassadeur russe Woronzov, à Vienne même avec Gentz; et bien que par un de ses attachés, Mallia, il entretint une correspondance particulière avec Czartoryski, il était l'artisan d’une révolution ministérielle générale qui devait partout précipiter le conflit. A Vienne, Cobenzl et Colloredo, suspects de ménagements pour l'ambition française, devaient céder la place à Trautmansdorf et à Stahremberg ; à Pétersbourg, Czartoryski, timide et hésitant, devait avoir pour successeur Panine ou Markov. Par dévouement envers Czartoryski comme par haine envers Razoumovwsky, d’Antraiques souhaitait le maintien des ministres en place, et un jour, en avertissant celui qu’il aimait des intrigues ourdies contre lui, il à rendu sans s’en douter service à l’histoire.

Sa lettre du 13 novembre 1804 éclaire un incident, resté jusqu'ici complètement obscur, des débuts du règne d'Alexandre Ie. Son ami Panine avait géré, en qualité de vice-chancelier, le collège des affaires étrangères sous