Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues
A DRESDE.— CZARTORYSKI, COBENZL (1802-1804). 221
le règne de Paul I‘; puis, deux mois avant la mort de ce prince, il avait été privé subitement de ses fonctions. Rappelé de l'exil et réintégré dans son ancien poste aussitôt après l'avènement de l’empereur Alexandre, il disparaissait de nouveau de la scène politique au bout de quelques mois, cette fois frappé d'une irrémédiable disgrâce. Quelle était la cause secrète cachée derrière cette cause apparente et commune, dans les autocraties, à toutes les disgrâces, la colère du souverain? Quelquesuns dirent que c'était pour avoir spontanément dissuadé l'envoyé français Duroc d'assister au couronnement ; puis on se tut, et le secret fût resté entre Alexandre et son sujet disgracié, si celui-ci, rencontrant à Dresde d’Antraigues, ne lui eût, dans un moment d'expansion, révélé la vérité. Panine devait sa chute à son intime ami Simon Woronzov, ambassadeur à Londres. Il avait eu l'imprudence de communiquer à celui-ci par écrit ses impressions sur le souverain, d’accuser le caractère indécis, faible et défiant de l'empereur. Woronzov, vexé peut-être de ne pas trouver Panine assez docile à ses conseils, avait envoyé la lettre à Alexandre. On devine le reste. Telle était la confidence que d’Antraigues, d'un ton assez embarrassé et avec toutes sortes de circonlocutions, faisait connaitre à Czartoryski, au moment où Panine, disait-on, voulait redevenir ministre : « Il pense, ajoufait-il, que la guerre avec la France est de nécessité absolue, mais que le fardeau est au-dessus de vos moyens, comme étranger et pis qu'étranger à la Russie; que vous n'avez pris aucun moyen de la soutenir, parce que vous ne faites aucune alliance, et que vous savez que la Prusse a des préventions contre vous; que vous avez cru finir tout ceci par des notes, comme un procès par écrit; que la chose est au point qu'il faudra en venir ou à une