Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

L'AMI ET L'AMIE DE PARIS. 234

réponse, où sont accueillies par un refus formel que dicte une prudence bien entendue.

Ce qu’il recevait pouvait déjà satisfaire sa curiosité. Nous trouvons en effet, parmi les annexes des lettres de Paris, des états d'effectifs de l’armée française, un mémoire de Talleyrand lu en Conseil de cabinet le 5 février 1805 (à condition que cette pièce ne fût point publiée) (1), des rapports de Laforest, ministre à Berlin, des lettres de La Rochefoucauld, ministre à Dresde, des parties de la correspondance d'Hédouville, ministre à Pétersbourg. En février 1804, l'ami a pu faire passer un relevé diplomatique complet, en d’autres termes les extraits importants des dépêches des agents français à l'étranger, faits par Durant et Talleyrand et mis chaque mois sous les yeux du Premier Consul ; et il promet que, si ces pièces reviennent des Tuileries au ministère avec des notes du maitre, ces notes prendront aussi le chemin de Dresde. L'année suivante, il tâte et fait causer par ordre le Saxon Schulenbourg, ancien chargé d’affaires en Russie et candidat au même emploi en France; il obtient de lui un portrait détaillé de Czartoryski, qu'il s'empresse de communiquer au modèle. Get homme avait certainement des complices autour de lui, entre autres deux frères Simon, employés aux bureaux de la guerre et des relations extérieures ; ceux-ci pratiquaient dès 1804 le métier qui coûta la vie à leur collègue Michel, l’espion du colonel Tchernytchev, en 1812 (2).

(1) C’est le rapport sur la constitution du royaume d'Italie que cite Thiers au commencement du livre III de son Histoire de l'Empire.

(2) A. F., France, vol. 631, f 152. — Communication faite (par d’Antraigues) aux ministres anglais, le 10 avril 1811, annexe n° 3. (R. O., France, vol. 87.)