Une mission en Vendée, 1793

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UNE MISSION EN VENDÉE, 1793.

9 Ventôse.

J'écris au Comité de Salut public.

« Je suis encore à la Rochelle, citoyens, où je me suis occupé de prendre les renseignements que m'avaient invité de prendre vos collègues Topsent et Guesno.

« Je suis presque sur les lieux. Je l'ai vu, je le dirai avec franchise, citoyens, on vous trompe, on tourne adroitement à l'avantage de vos ennemis les mesures sages en elles-mêmes que vous prenez pour les détruire. Vous avez ordonné qu'on brülât les repaires des brigands. Croiriez-vous que, sous prétexte de se conformer à cette disposition d’un de vos arrêtés, on a brûlé des communes entières dont les habitants, animés d’un zèle très louable, s’armaient de fourches, de faux, de fusils et arrêtaient eux-mêmes les brigands pour les livrer à l’armée républicaine? Croiriez-vous que , sous prétexte de suivre vos ordres, on égorge les enfants, les femmes, les municipaux en écharpe à la suite d’un banquet civique donné par eux à une division de l’armée? Croiriez-vous qu'au moment où la famine semble menacer ces contrées, on incendie jusqu'aux magasins de subsistances, et que ceux non incendiés sont livrés à l'ennemi? Croiriez-vous que vos généraux donnent l'exemple du pillage et veulent faire dégénérer en vil métier de voleur le sublime emploi de défenseur de la patrie ?

« J'ai vu des malheureux, abandonnés au désespoir, n'ayant d'autre perspective que la mort et de la part de l'armée républicaine et de la part de la horde royale. Les habitants d’une commune qui avaient concouru à l'arrestation de plusieurs scélérats à la suite de Charette, craignant d’être victimes de la dévastation