Une mission en Vendée, 1793

268 UNE MISSION EN VENDÉE, 1793.

crédule, facile. On a profité de ce qu’il était si rapploché de la nature pour en faire l’instrument des maux de la société. Quand le fanatisme a voulu attiser la Vendée, des hommes en soutane ont parcouru les champs, ont semé l'erreur pour recueillir le crime. Les brigands se sont armés et la superstition a compté dans la féconde année de la Raison et de la Liberté ses héros et ses martyrs. À vous il appartient de guérir le mal, de faire briller la lumière où s'épaissit encore l'ignorance, de prouver cette vérité que j'ai répétée souvent et que je confirme tous les jours. Le peuple est si bon qu’il faut le calomnier pour en dire du mal, et que pour le conduire au mal il faut l’égarer. Dissipez l’égarement, instruisez le peuple; il va toujours droit au bien dès qu'il est éclairé. :

J'entendais hier un récit touchant qui m'était fait par un des commissaires envoyés dans les campagnes voisines pour la vérification des grains. Arrivé dans un village, il contemplait la verdure des blés, cet espoir de la récolte prochaine; il admirait l'éclat du soleil printanier qui féconde la terre et nous promet l’aimable germinal ; ilsouriait à la nature renaïssante, aux arbres en fleurs, à la joie de la campagne. Un bon vieillard se présente. Le plaisir, comme les douleurs, à besoin de s'épancher. Il s'adresse à lui : « Quel est ton bonheur de voir naître ce blé qu'ont semé tes mains! Tu as la vraie jouissance; elle est dans les succès de tes utiles travaux. — Tu peux, lui dit le vieillard, avoir ce bonheur que tu parais m'’envier. Nous, habitants des campagnes, notre art est l’agriculture et nous labourons, nous semons, nous récoltons, pour nourrir, non pas nous seulement, mais aussi les habitants des villes. Vous qui avez plus de lumières que nous, devez semer dans nos esprits l'instruction du patriotisme; faites