Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...

— 130 —

hison, puni chez les plus fidèles sujets du margrave ‘. Sans doute Charles-Frédéric refusait des fusils au cardinal de Rohan”, il renvoyait de ses états quelques-uns des plus remuants parmi les partisans notoires des princes *, mais on sentait bien qu'une crise approchait et qu'il serait entraîné, comme tous les autres princes de l’Empire, dans la grande croisade contre la Révolution *.

Nous avons déjà vu que Butré n’éprouvait aucune tendresse pour cette dernière; mais d'autre part il était loin de sympathiser avec les fugitifs, chaque jour plus nombreux, dans son voisinage, qui ne rêvaient que le rétablissement de l’ancien régime et de tous ses abus. De là, pour lui, un isolement absolu ; son ami, le baron d'Edelsheim, avait, lui aussi, autre chose à faire, dans ces temps agités, que de poursuivre le rêve d’une refonte générale des impôts, puisqu'il fallait de Pargent, et beaucoup d'argent, pour se tenir prêt à braver la crise imminente. Il n’y a donc rien d'étonnant à ce que notre solitaire, quand il ne pouvait travailler à Ettlingen même, se réfugiât dans les vastes terrains possédés par Fritz, près des

1 Le libraire de la Cour, Macklot, fut condamné à trois jours de prison pour avoir exposé dans son journal, non seulement les arguments contre la nouvelle Constitution française, mais encore les arguments qui militaient en sa faveur; on permit, par grâce, à son fils d'aller en prison à la place du vieillard. Voy. Strassb. Zeitung des 19 et 27 août 1791.

? Pol.-Lit. Kurier, 18 avril 1791.

3 Pol.-Lit. Kurier, 6 juillet 1791.

4 Tandis que les uns d’entre les journaux strasbourgeois tâchaient de l’encourager dans cette attitude, en vantant son tact et sa prudence (Voy. p. ex. la Strassb. Zeitung du 29 août 1791), d’autres feuilles, plus radicales, déclamaient contre ce « faux Titus », qui s’abaissait jusqu’à faire décacheter les lettres adressées aux officiers de sa garde, afin de surprendre les menées révolutionnaires. (Voy. Geschichte der gegenwürtigen Zeit, du 25 janvier 1792).