Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...

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écrivait Butré en 1799, en savent plus qu'aucun jardinier daucun autre endroit et elles m'ont donné des leçons que je n’oublierai jamais. » Toutes les femmes qu’il rencontre dans ces petits villages, cachés par la ceinture verdoyante de leurs arbres fruitiers, ne sont pas d’ailleurs des paysannes ; il y a dans ses papiers une lettre de la femme Denis (datée de Rueil, 29 nivôse de l'an VIII), dont la tournure élégante et les allusions discrètes à une ruine profonde, semblent bien trahir la plume d’une ci-devant de l’ancien régime. On comprend, en lisant ces détails, que, peu à peu, Butré se soit consolé de sa mésaventure en philosophe pratique, et qu’il se soit résigné à vivre là où la Providence l'avait placé, une fois la grande crise terroriste passée. Sous ce rapport la lettre suivante à Fritz est bien curieuse; c’est le cri de l’âme d’un honnête homme, qui peut enfin respirer en sûreté, et qui n’a plus besoin de mentir pour pouvoir dormir en paix.

€ Paris, 9 brumaire, l’an III de la République française. (30 octobre 1794). « Citoyen,

« Je vous embrasse tous et désirerais bien. vous voir. Comment va-t-il dans votre bonne ville ? Y est-on tranquille, les denrées et les vivres y sont-ils abondants? Pour ici, depuis qu'on vient de rompre le maximum, il y à abondance de tout, à la vérité fort cher, mais cela vaut infiniment mieux que la disette que nous avons toujours éprouvée pendant qu'on à voulu faire régner le maximum, qui nous faisait manquer de tout, excepté de pain, que nous avons toujours eu à trois sols la livre, et tant que nous avons voulu. Mais, Dieu merci, avec l’abondance nous jouissons d’une grande tranquillité, depuis qu'on a fait tomber la tête des tyrans qui

citoyen Chevalier, cultivateur à Montreuil, du 29 nivôse , an VII (18 janvier 1799) qui donne à Butré, « qu’il aime toujours comme un ami », des nouvelles des bons amis du village, en les énumérant.