Charles de Butré 1724-1805 : un physiocrate tourangeau en Alsace et dans le margraviat de Bade : d'après ses papiers inedits avec de nombreux extraits de sa correspondence...

on y retrouve exposé tout au long cette distinction si fausse, dont nous parlions plus haut, de la classe productive et des classes stériles, et le point de départ étant erroné, les conclusions de l’auteur sur « l’ordre social complet » ne sauraient être admises aujourd’hui. Toutefois il n’estpas sans intérêt dy constater une fois de plus, combien peu, neuf années avant la Révolution, certains groupes de novateurs au moins, étaient loin de réclamer pour eux et leurs semblables les bienfaits de ce que nous appelons aujourd’hui les principes de 1789. Comme tant d'autres économistes et philosophes de ce temps, comme le marquis de Pezay, par exemple, dans ses Soirées alsaciennes, helvétiques et franc-comtoises, qui venaient de paraître, Butré trouve son idéal de gouvernement en Chine. Il ne peut assez vanter « cette grande, cette inaltérable société » et c’est sans la moindre intention satirique qu'il nous dira, pour vanter les mesures libérales du grand-duc de Toscane, que « Son Altesse Sérénissime marche à grands pas vers la liberté chinoise ».

Le travail de Butré se termine par un appendice sur le «revenu public de France », inspiré par le fameux Compterendu au Roi, de Necker, qui lui parvint « dans les Alpes, où il était alors », occupé à surveiller l'impression de son livre. C'est une critique assez sévère de certains chapitres du mémoire « du second Sully qui administre aujourd'hui les finances de la France »; il en admire « l'âme pure et sans tache, qui marche hardiment au bien, sans nulle crainte des coassements de la cupidité », mais il lui reproche de mal combiner ses mesures pour soulager le pays et en propose de plus fécondes en résultats heureux. Plus les peuples sont malades et moins les médecins leur manquent; ce n’est pas faire tort à Butré que d'affirmer que, pas plus qu'un autre, il n'aurait arrêté la menacçante banqueroute et rétabli « la plénitude des lois essentielles de l’ordre social » qu'il vantait comme une panacée universelle. Nous ne savons pas d’ailleurs