Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

PIÈCES JUSTIFICATIVES. 255

lés soulenait dans leur révolte par des négociations particulières et prodiguait, pour leur défense, cet or que la libéralité de la nation lui avait accordé pour un plus noble usage.

« Une ligue de rois s'était formée contre la souveraineté du peuple français. Elle osait menacer son indépendance et lui dicter, les armes à la main, les conditions auxquelles elle voudrait bien permettre à la France d’être libre; et le chef du peuple français gardait un honteux silence. Les citoyens français élaient insultés chez tous les despotes de l’Europe. Les voyageurs étaient en butte à mille outrages, les commerçants à mille avanies; et les ministres du roi des Français près des puissances étrangères ne se mettaient en peine ni de venger l'honneur ni de protéger le commerce national. Il fallait avilir la liberté aux yeux de tous les peuples pour affermir le despotisme chez les uns et le ramener chez les autres.

« Forcé enfin par l'éclat de l’indignation publique et par l'avis unanime de son conseil, le roi fit au Corps législatif la proposition formelle de la guerre contre le roi de Hongrie, qui succédant au trône et à la haine héréditaire de sa famille contre un royaume qui, depuis plus de trente ans, portait tout le poids de son alliance, pour prix de cette foi constante séparait insolemment Louis XVI de la nation, et se déclarait en même temps Vami du roi et l'ennemi du peuple. Mais comment fut conduite cette guerre depuis si longtemps prévue ? Les frontières dégarnies, les places fortes démantelées, les régiments de ligne incomplets, les bataillons de volontaires dénués d'armes et d’habits, nul amas de vivres et de munitions, les magasins vides, les troupes obligées, faute de tentes, de coucher au bivouac, et exposées plusieurs jours de suite aux rigueurs de la faim et aux injures de l'air ; rien n’était prêt pour attaquer l’ennemi, tout était disposé pour rebuter les troupes à force de travaux et de fatigues, laisser le temps à l'ennemi de rassembler son armée et livrer aux fers des Autrichiens et des Prussiens nos légions découragées et à demi vaincues. Quand la valeur de nos guerriers eut renversé les barrières que leur opposait la malveillance du gouvernement, des entreprises mal concertées, des déroutes préparées avecautant de soin que des victoires, des cris de trahison, des défiances, d’odieux soupçons, tous les ressorts que peut faire jouer la politique de tyrannie, tout fut mis en œuvre pour enivrer la nation entière de terreurs paniques et de fureurs insensées, et la précipiter au-devant du joug que venaient lui porter les satellites du despotisme : tels sont les actes formels par lesquels le roi s’opposa à une armée qui venait en son nom envahir la France. Cependant on attisait avec soin dans l’intérieur le feu de