Du role des légistes dans la Révolution : discours prononcé à l'audience solennelle de rentrée la 3 novembre 1880

quence de cette juste conception qui envisageait le mariage comme un contrat, pour le traiter à l'exemple d'une vente ou d'un bail, et proclamer que les mêmes volontés qui l'avaient formé le pouvaient détruire. La logique n’a pas de telles exigences.

Le mariage doit rester un contrat; mais il ne doit pas être rompu par le seul caprice des parties contractantes. Au dessus de l'intérêt individuel, il existe un droit social qui le domine et le limite. Dans le mariage, le droit social protège, contre les époux eux-mêmes, l’institution qui crée la famille, un des organes de l'État.

Quelle doit être l'étendue de cette protection? C’est la question que l’on débat et qu'il faut résoudre. Pour moi, Messieurs, je ne puis, quand je songe à un problème aussi ardu et si actuel, détacher mes regards des enfants placés entre leurs parents irrités. Ne sontils pas appelés à les apaiser et à les rapprocher? Dans leurs jeunes âmes, si sensibles et si pures, se peutil que les sentiments de l'affection filiale cèdent devant l'indifférence, le mépris ou la haine engendrés par la vue des dissensions domestiques el des éloignements irrévocables ? Pour les esprits hésitants, ne doivent-ils pas être comme l'épée de Brennus jetée dans la balance, et faire pencher celle-ci en faveur de l'indissolubilité du lien conjugal ?

Cependant le législateur n’est pas un moraliste sentimental; la cruelle réalité est là qui le presse; ilse trouve en présence d’étranges situations donnant le spectacle de «l’amoursans le mariage et du mariage sans l'amour», qui doivent éveiller son attention. Elles soulèvent des questions de moralité, et j’ajouterai qu'elles touchent par un certain côté à la statistique criminelle; à ce point de vue, nous avons le devoir de nous en préoccuper. Mais quelle que soit la solution adoptée, il est nécessaire