Étude historique et critique de l'impôt sur le sel en France : thèse pour le doctorat

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La loi de finances vint bientôt en discussion. Le conseiller rapporteur Crétet, chargé de soutenir le projet, pour effacer toute impression défavorable et gagner l'opinion, s’efforça de faire ressortir les différences qui séparaient le nouvel impôt des anciennes gabelles :

« Les gabelles furent justement odieuses, fit-il observer, parce qu'elles étaient un impôt sans égalité et sans discrétion. Les gabelles étaient odieuses par le monopole ou la vente exclusive réservée au gouvernement, par la contrainte imposée aux consommateurs d'acheter des quantités déterminées de sel, sans égard pour leur convenance ou leurs facultés, par les précautions qu'il fallait opposer aux versements frauduleux, par la présence d’une multitude d’employés, par l'exercice intolérable qu'ils étaient obligés de faire, et par les peines exorbitantes infligées à la fraude.

« L'abolition des gabelles fut donc justement considérée comme l’un des plus précieux bienfaits de la Révolution: et puissent les destinées de la nation la préserver à jamaisdu retour d’une pareille institution !

« Mais combien est différente des anciennes gabelles une contribution légère, uniformément perçue sur les lieux de production, exempte de toute visite, de tout exercice, de tout monopole, et laissant au commerce la libre vente du sel! L’ignorance, les préventions absurdes ou la mauvaise foi pourraient seules introduire des comparaisons entre deux choses aussi disparates » (1).

(1) Rapport au Corps legislatif du 15 avril 1806. — MERLN, Sel. p.332.