Étude historique et critique de l'impôt sur le sel en France : thèse pour le doctorat

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estampillé. Ces mœurs n’ont rien qui puisse nous surprendre, si l’on considère que parfois, afin de remédier aux fréquentes désertions des soldats, on incorporait de force les faux sauniers, en leur faisant remise de leurs peines (1).

En 1718, en Champagne et en Picardie, il s'était formé une association de 5000 faux sauniers ; on dut envoyer contre eux le gouverneur d'Amiens; mais les soldats eux-mêmes se livraient au faux saunage par bande de deux à trois cents, et pillaient le sel déposé dans les magasins du Boulonnaïs et de la Picardie (2).

Certains officiers fermaient les yeux sur ce trafic, quand ils n’avaient pas d'argent pour payer leurs hommes, comme le colonel de Pontis, qni se vante, dans ses mémoires, d’avoir trouvé le moyen de faire vivre ainsi son régiment, sans que le roi ait rien eu à débourser.

La peine capitale était le remède à ce mal nécessaire ; les soldats pris les armes à la main étaient pendus ou condamnés aux galères perpétuelles (ord. du 20 avril 1734, art. 3 et 4), quand ils avaient contribué à la contrebande, ce qui faisait dire au roi, dit de Pontis, « je ne les empêcherai pas d’être faux saulniers:; mais s’ils sont pris par la justice, je ne les empêcherai pas aussi d’être pendus » (3).

(1) Correspondance des Contrôleurs généraux. T. III, n° 939 et 1493.

(2) Pauz Borreac. État de la Franee en 1789, ® édition, p- 389.

(3) A quoi de Pontis répondit gaiement que ses soldats étaient

braves, et qu'il serait fort trompé s'ils se laissaient prendre. Mémoires de de Pontis, collection Michaud. T. XX, p. 602.