Garat 1762-1823

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cravate à gauche, malgré l'autorité de Garat qui la nouait à droite et en dépit du vulgaire qui s’obstine encore aujourd'hui à la nouer au milieu ». Mais ces temps étaient évanouis. Morose et désillusionné, Garat s’acheminait lentement et douloureusement vers la mort. Les visiteurs, qui se succédaient jadis si nombreux chez lui, se firent de plus en plus rares, et, presque solitaire, harcelé par les infirmités et la maladie qui envahit peu à peu son cerveau, à demi couché sur une bergère au coin de son feu, ilse remémorait ses triomphes passés, ses illustres fréquentations ; il se revoyait comme dans un songe à Trianon, à côté du clavecin de la Reïne que tenait Salieri, se préparant à chanter un duo de Gluck ou de Mozart avec Marie-Antoinette, tandis que Kreutzer accordait son violon et que Piccini approchait son hautbois de ses lèvres; il se revoyait chez Tallien, chez Barras, chez madame Bonaparte, roucoulant Bouton de rose, et excitant l'enthousiasme que l’on sait. Il passait une sorte de revue funèbre de ces mondes si différents dont il avait été l’idole et le favori. Il songeait avec une inconcevable

tristesse, lui, l'homme jadis accoutumé à jeter 99