Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu
LE VICOMTE DE NOAILLES 9
sabre, on ne raisonne pas. Qu'il ait rapporté d’Amérique «des chimères », c’est fort possible; mais un esprit si naturellement imbu de justice, d'honneur, a aù être porté, tout naturellement aussi, vers les essais, vers les mesures qui étaient des émancipations, et, quoi qu’on puisse dire, des progrès sur le favoritisme, par conséquent sur l’injuste.
Tout Français alors était philanthrope, même les gens de cour; les philosophes avaient déteint. Noaïlles revenant d'Amérique tomba au milieu d'une société qui discutait tout et sur tout. Dans les salons, il y avait deux partis : les courtisans du duc d'Orléans (les conspirateurs), et les royalistes (les fidèles), mais il n'y avait presque qu’une opinion sur le despotisme : l’on n’en voulait plus. Sans abdiquer les vieilles traditions et les belles formes de l’ancien régime, la conversation française s’enrichissait de débats sérieux sur les sujets les plus graves et les plus beaux...
Dans aucun pays, ni dans aucun temps, l’art de parler, sous toutes ses formes, n’a été aussi remarquable (L).
Ce fut un moment rapide, mais délicieux.
C'est ici que se place le mot de M. de Talleyrand appréciant cette fin desiècle : « Qui n’a pas vécu alors ignore le bonheur de vivre. »
ILest vrai que «l’exaltation allait chez quelques-uns à l'aveuglement, et que, comme l’astrologue de la fable, l'on tombait dans un puits en regardant les
(1) M°° ne Sraez, Considéralions sw la Révolulion française. Le
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