Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu
LE VICOMTE DE NOAILLES 17
a envoyé ses commissaires dire au tiers état que, se conformant aux instructions de leurs cahiers, les nobles sont dans l’intention de renoncer à toute exemption pécuniaire, et le 23, le duc de Luxembourg, parlant au nom de l’ordre, a exposé « que ce vœu est aussi certain qu'irrévocable (4) ». Donc les privilèges immolés sont prescrits par l’opinion publique et par les privilégiés eux-mêmes ; Noailles ne fait qu’enfoncer une porte ouverte, seulement il la pousse au moment opportun.
L'Assemblée nationale est réunie pour entendre lecture d'un projet de proclamation au peuple français. On y prêche la modération, le respect de la loi; mais il n’y est question d'aucun des sacrifices projetés ; l’on n’a pas osé les y consigner, et pourtant la France les veut ; continuer à se taire est une témérité qui aura d’irréparables conséquences. Noailles s'élance, gourmande les timorés, réchauffe les âmes. Son discours» qui ne dure pas quaire minutes, estun chef-d'œuvre de réalisme populaire :
Les communautés, dit-il, ont fait des demandes : ce n’est pas une constitution qu’elles ont désirée; elles n’ont formé ce vœu que dans les bailliages: qu’ont-elles donc demandé? Que les droits d’aides fussent supprimés ; qu'il n’y eût plus de subdélégués, que les droits seigneuriaux fussent allégés ou échangés.
Ces communautés voient depuis plus de trois mois leurs représentants s'occuper de ce que nous appelons, et de ce qui est en effet la chose publique ; mais la chose publique
(1) Moniteur universel du 14 au 23 mai 1789.