Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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LES ÉTATS GÉNÉRAUX. L'ASSEMBLÉE CONSTITUANTE 97

tyrannie de détail, plus pesante souvent que le despotisme, y est contenue. Liberté civile, liberté de la presse, États provinciaux liés aux Etats généraux, États généraux périodiques, enfin une partie considérable de ce que demandent tous les bons esprits et tous les bons citoyens, se trouve annoncée dans ce rapport que vous lirez sûrement avec un grand intérêt. »

Cela est vrai. Mais l'abbé Morellet se contentait de peu, puisque les États généraux eux-mêmes étaient pour lui presque trop. Tout cela c'étaient des vues, des intentions, des projets qui n'avaient même pas encore la forme plus précise qui leur sera donnée le 23 juin. Ce qu'il eût fallu, pour dominer la situation et diriger le courant de l'opinion, c'était une Constitution complète, précise et promulguée, un acte définitif de la royauté et non plus de vagues promesses.

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Le gouvernement de Louis XVI n'avait pas su prendre la direction de la Révolution. Bien plus, en convoquant les États généraux, il laissait ouvertes des questions capitales : parfois c'était lui-même qui les avait posées sans les résoudre.

En premier lieu, le rapport du 27 décembre 1768 et le règlement du 24 janvier, qui l'avait suivi, avaient introduit une importante innovation, le doublement du Tiers, c’est-à-dire que le tiers état allait avoir à lui seul autant de députés que les deux autres ordres réunis. Cela était bien conforme au vœu de l'opinion publique : l’abbé Morellet le constate lui-même : « La noblesse et le clergé manifestaient un vœu non seulement antipopulaire, mais antinational ?. » Ce n'était point non plus tout à fait une nouveauté. Necker, durant sa première administration, avait construit d’après ce principe les diverses assemblées provinciales qu'il avait créées à titre d'essai : on l'avait également suivi pour les assemblées provinciales que l'Édit de 1787 avait établies dans tous les pays d'élection. Mais là, dans ces corps administratifs, on avait accompagné

1. Lellres, ete., P: 279. — 2. Lellres, ete., y