Gouverneur Morris : un témoin américain de la Révolution française

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déjà en session depuis longtemps et ils n’ont rien fait. Jusqu'ici ils ont été engagés dans une discussion sur le point de savoir s'ils formeraient un corps ou trois. Les Communes, qui sont représentées par un corps égal aux deux autres, et qui de plus ont pour elles la moitié au moins des représentants du clergé, insistent pour former une Chambre unique. Elles ont réussi, mais les nobles ressentent profondément leur situation. Le roi, après s'être mis de leur côté, a été effrayé et les a abandonnés. Il n’agit que par terreur. La soldatesque dans cetle cité, particulièrement les gardes françaises, déclarent qu'ils n’agiront pas contre le peuple. Ils sont actuellement régalés par la noblesse et paradent dans les rues, ivres, poussant des hourras en faveur du tiers... Les gardes du corps sont en général de chauds adhérents du tiers autant que personne, quelque étrange que cela puisse paraître, de sorte qu’en réalité l'épée a glissé des mains du monarque sans qu'il se soit aperçu de la moindre chose !. »

Dès ce moment Morris connaît et décrit la future Constitution qui doit sortir de l'Assemblée nationale : « Déjà certaines personnes parlent de limiter le veto du roi sur les lois, et. comme ils ont jusqu'ici cruellement senti l'autorité exercée par leurs princes, toute limitation de cette autorité leur parait désirable. Comme ils n’ont jamais senti les maux d'un trop faible exécutif, les dangers qu'on peuten appréhender ne font encore aucune impression... Ils établiront un législatif démocralique, car vous remarquerez que les ordres de la noblesse et du clergé sont dorénavant voæ el prælerea nihil. Le roi sera réduit à la somme exacte nécessaire pour ses dépenses personnelles. L'administration de la dette publique et des revenus prévus pour y faire face sera mise entièrement hors de ses mains, et le maintien de l’armée dépendra de concessions temporaires. Telle est l’esquisse de la Constitution proposée, qui abrogera également les leltres de cachel et établira la liberté de la presse *. »

Cette lettre étonnante contient encore sur le futur régime administratif des indications qui mettent en pleine lumière

1. pers, roge — 12: F./lp--r00: